Zurich (awp) - D'ici 2030, Migros compte réduire de plus de deux tiers les émissions de gaz à effet de serre liées à l'exploitation du groupe, afin d'atteindre zéro émissions 20 ans plus tard. Des ONG saluent les efforts, mais dénoncent des mesures insuffisantes.
Concernant le commerce de détail, le géant orange souhaite réduire de 80% les émissions de gaz à effet de serre liées à l'exploitation (scopes 1 et 2) d'ici les huit prochaines années, selon le communiqué paru jeudi. Cela passe par trois mesures principales: 100% d'énergie renouvelables, une logistique propulsée à l'électricité ou à l'hydrogène et des installations frigorifiques économes en énergie dans les magasins. Le commerce de détail des coopératives est déjà "climatiquement neutre" depuis ce mois-ci au niveau de l'exploitation.
Pour Greenpeace, "c'est bien que Migros avance et se base sur un cadre scientifique", le Science Based Targets Initiative (SBTi), salue Georg Klingler, chargé de la campagne climat pour l'ONG, auprès d'AWP. "Mais cette communication mettant en avant le commerce de détail climatiquement neutre n'est pas très honnête. Car cela ne représente que 2% à 3% des émissions de CO2 de Migros. C'est une non-nouvelle", selon lui. Les émissions restantes sont compensées par des projets liés à la protection de l'environnement dans la chaîne d'approvisionnement, dans le cadre du programme Insetting mené avec la Fondation myclimate. Le distributeur "n'achète pas de certificats de CO2", mais soutient "des projets de développement durable". Par exemple, Migros forme 1000 familles paysannes en Thaïlande à une méthode de culture du riz plus respectueuse du climat, permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre jusqu'à 60%. "Plus de 10% des émissions mondiales de méthane sont ainsi imputables à la culture du riz", assure Migros.
Problématique des produits
Autre ambition, baisser de 30% les émissions tout au long de la chaîne d'approvisionnement d'ici 2030, "alors que la culture et la fabrication des produits (scope 3) sont les principales sources d'émissions de gaz à effet de serre au sein du groupe". Migros explique collaborer avec ses fournisseurs, dont plus de deux tiers ont fixé leur propre agenda d'ici à 2026.
Pour Christian Lüthi, directeur de l'Alliance climatique suisse, cette réduction de 30% des émissions du scope 3 (ensemble de la chaîne de valeur en amont et en aval de la fabrication des produits) "est un signe de bonne volonté, mais ce n'est pas assez ambitieux". Il se demande aussi "si les émissions au cours de la durée de vie du groupe Migros sont toutes comprises, notamment celles des énergies fossiles vendues par Migrol?"
Greenpeace pointe de son côté le fait que "les trois quarts de toutes les émissions viennent de la production alimentaire, dont la moitié des produits animaux", notamment la viande, le lait et le fromage. Dans son communiqué, Migros dit "promouvoir une alimentation des animaux de rente plus économe en énergie". Mais pour Georg Klingler, il s'agit là de "l'optimisation d'un système qui ne fonctionne pas. Il faut que Migros mette en place de grands changements pour réduire la fabrication et la consommation de ces produits issus des animaux. Le zéro émission ne fonctionne pas avec ce qui est annoncé" ce jeudi.
Il rappelle d'ailleurs "le projet Micarna de méga-abattoir de volailles à St-Aubin", qui selon la presse locale, doit traiter 40 millions de poulets chaque année.
"Au lieu de sensibiliser les gens et de réduire la quantité d'abattage, Migros compte sur l'augmentation du nombre d'abattages par an et ne prévoit donc clairement aucune réduction de la consommation de produits d'origine animale, même si c'est justement ce qui aurait le plus grand potentiel de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Ces annonces semblent donc relever plus du greenwashing qu'autre chose", souligne Greenpeace, qui a récemment mené campagne contre la publicité en faveur des produits carnés.
Migros assure que les entreprises du groupe ont fixé des objectifs intermédiaires pour 2030, pour qu'au-delà de 2050, plus aucun gaz à effet de serre ne soit émis par Migros, objectif "compatible avec l'accord de Paris sur le climat". "Nous avons énormément de pain sur la planche, car le zéro net est un objectif très ambitieux", a déclaré Fabrice Zumbrunnen, président de la direction générale de la Fédération des coopératives Migros, cité dans le document.
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